Le nouveau ministre de l’Education nationale, M. Édouard Geffray, est un ancien de la toute-puissante DGESCO (Direction générale de l’enseignement scolaire) au sein du ministère de l’Education nationale, qu’il a dirigée de juillet 2019 au mois d’août 2024. A ce titre, il a démontré son désintérêt pour l’instruction en famille, qui est pourtant une des composantes de la liberté scolaire et éducative. (Et bien qu’une partie de ses enfants soit inscrite dans l’enseignement privé sous contrat). Retour sur nos échanges avec lui et son service.
La DGESCO, fer de lance de la politique anti-instruction en famille
Rappelons d’abord que c’est à la DGESCO que revient notamment la mise en œuvre de la politique anti-école à la maison mise en place par le Président Macron depuis octobre 2020. Ainsi la DGESCO ne communique jamais sur les chiffres des refus département par département, académie par académie, le nombre d’enfants instruits en famille ayant chuté de 57% depuis la loi séparatisme. Chiffres que nos associations sont obligées d’obtenir à coups de référés ou de saisines de la CADA (Commission d’accès aux documents administratifs). Et pour cause : ils révèlent de nombreuses disparités dans le traitement des dossiers, avec notamment une importante discrimination territoriale selon les académies, certaines affichant un taux de refus de plus 90% alors que d’autres sont bien plus tolérantes vis à vis de cette liberté fondamentale des parents, premiers et principaux éducateurs de leurs enfants. Une liberté fondamentale et un droit humain inaliénable pourtant garantis par de nombreuses conventions internationales, comme l’ONU l’a récemment rappelé à la France.
La DGESCO s’était aussi malheureusement illustrée par le report de la publication du rapport bi-annuel sur l’instruction en famille, finalement diffusé après le vote de la loi séparatisme. Or ce report avait contraint de facto la représentation nationale à voter à l’aveugle, sans le chiffre des enfants instruits en famille posant réellement problème : alors seulement 0,09% d’entre deux.
La DGESCO, véritable tour d’ivoire ?
Notre association a participé, au sein de l’interassociation nationale de l’instruction en famille, à plusieurs rencontres avec la DGESCO, qui n’ont jamais permis un début de collaboration, ni un dialogue serein et constructif, malgré nos nombreuses attentes, en toute bonne foi.
Notons ainsi :
- Le 10 novembre 2020, quelques semaines après l’annonce du Président Macron de souhaiter purement et simplement l’interdiction de l’instruction en famille, les associations nationales de l’IEF ont eu une réunion avec M. Edouard Geffray, en présence de la direction des affaires sociales mais de Richard Senghor, conseiller spécial du ministre de l’Education nationale d’alors, Jean-Michel Blanquer. Au cours de cette réunion par Zoom, Richard Senghor précisa que l’école publique pourrait absorber sans problème les milliers d’élèves issus de l’IEF et rescolarisés malgré eux. Cette réunion n’apporta donc aucune réponse à nombreuses questions posées par nos associations qui se mobilisaient contre l’interdiction de l’école la maison et pour le maintien de cette liberté fondamentale. Pour l’anecdote, deux minutes avant la fin, les associations furent prévenues que cela allait couper… sans que toutes les questions aient été abordées.
- Le 5 octobre 2021, une réunion avec le directeur adjoint de M. Edouard Geffray à la DGESCO, avait démontré une nouvelle fois, si c’était encore nécessaire, l’absence totale de volonté de travailler avec nos associations, qui connaissent pourtant bien la réalité du terrain.
- Le 21 septembre 2022, à notre demande, M. Edouard Geffray était interrogé, en Commission des affaires culturelles et de l’Education de l’Assemblée nationale, par la député Anne-Laure Blin, sur l’instruction en famille. Ses réponses comportaient de nombreuses erreurs factuelles et aucun chiffre précis (revoir la vidéo et lire notre synthèse).
- En juin 2023, nous avions eu de nouveau un rendez-vous à la DGESCO : il n’y eu aucune réaction à notre présentation de nombreux refus injustifiés d’instruction en famille avec des exemples concrets démontrant, comme nous l’avions pourtant annoncé et répété, l’inanité de cette loi.
- Le 18 septembre 2024, la Commission des affaires culturelles et de l’éducation auditionnait le successeur de M. Edouard Geffray à la DGESCO, Mme Caroline Pascal, et une question lui fut posée par le député Xavier Breton au sujet des nombreuses atteintes à la liberté d’instruire en famille. Mais, hélas, ses réponses furent lunaires, encore une fois très éloignées de la réalité du terrain (revoir la vidéo), montrant son peu d’ouverture pour une liberté pourtant fondamentale.
Ebauche de solutions
Le nouveau ministre de l’Education nationale n’est donc pas favorable à la liberté fondamentale d’instruire en famille. Le Président Macron a d’ailleurs répété à l’envi que ce ministère était son pré carré. Don acte. Mais ce ministre n’est pas éternel et nous devons penser à la suite (échéance 2027). Dans une vie démocratique normale, il conviendrait, pour sortir de l’impasse, de trouver un mode à faire ensemble entre le ministère de l’Education nationale et nos associations nationales de l’instruction en famille, qui pourrait aboutir à un partenariat et la signature d’une convention de collaboration avec la DGESCO.
A moins que la DGESCO ne soit définitivement pas le bon interlocuteur : il faudrait alors créer une nouvelle instance, indépendante du ministère, pour traiter des questions de l’instruction en famille, qui ne serait donc pas juge et partie. Ce qui nécessiterait une réelle volonté politique, absente de l’exécutif actuel. Qui saura, à l’avenir, relever ce défi ?
