L’article 21 du projet de loi pour renforcer les principes républicains – anciennement séparatisme – vise à changer le régime déclaratif de l’école à la maison pour le passer en régime d’autorisation. Laurence Fournier, maman IEF, auteur d’un blog très connu sur l’école à la maison, porte-parole du Collectif Ecole Est La Maison, a été auditionnée vendredi 8 janvier en Commission spéciale de l’Assemblée nationale, au sein de l’inter-associations IEF. Voici le texte de son intervention.

L’article 21 n’est pas nécessaire pour répondre aux inquiétudes pointées par le président de la république le 2 octobre. Les catégories problématiques d’enfants que cherchent à viser l’article 21 sont en fait déjà traitées par les lois en vigueur (art L131-1 et suivants du code de l’éducation).

Ces catégories sont :

1. Premièrement : Les enfants déclarés instruits en famille (L131-5), ne recevant pas ou peu d’instruction ou encore une instruction, qui dans certaines matières ou thématiques, viendrait en opposition avérée aux valeurs de la République.

Pour ceux-là, nous rappelons que la loi y répond. C’est tout l’objet des contrôles de mairie et de l’Education nationale (L131-10) ! Pour mémoire, les contrôles peuvent être annoncés ou inopinés. Celui de la mairie peut être immédiat. En cas de défaillances au premier contrôle de l’Education nationale, un second contrôle est diligenté, et en cas de second contrôle insatisfaisant, une injonction de scolarisation sous 15 jours est prononcée. Des sanctions sont d’ailleurs définies dans la loi. (L131-11)

2. Deuxièmement : Les enfants déclarés instruits en famille mais qui seraient regroupés en écoles de fait.

En inscrivant dans la loi les contrôles inopinés, l’Etat s’est déjà doté de l’outil permettant de révéler les cas d’écoles clandestines. Depuis 2007, il est de toute façon interdit d’instruire ensemble des enfants de différentes familles déclarés en instruction en famille. (L131-10). Rappelons que la Loi Gatel a ajouté des sanctions pénales pour les directeurs de ces établissements et la loi pour une école de la confiance, des sanctions pénales lourdes pour les parents de ces enfants.

Les textes actuels suffisent dès lors qu’ils sont mis en application. De plus, messieurs Blanquer et Darmanin ont à plusieurs reprises évoqué, ces derniers mois, des cas d’écoles clandestines fermées en 2019 et en 2020, faisant par là-même, la démonstration que les outils et l’arsenal législatif existent bel et bien pour détecter ces écoles de fait et pour rescolariser les enfants concernés, qu’ils soient d’ailleurs déclarés instruits en famille ou non. L’article 21 n’est assurément pas nécessaire.

3. Troisièmement : Les enfants déscolarisés, c’est à dire retirés de l’école par leurs parents, mais non déclarés comme instruits en famille.

Cette catégorie d’enfants ne relève pas de l’instruction en famille puisqu’ils ne sont pas déclarés comme tels et donc non contrôlés comme tels. Ces enfants tombent sous le coup de l’article de loi qui régit l’absentéisme scolaire (L131-8). C’est bien au Ministère de l’éducation nationale, aux établissements scolaires de prendre leurs responsabilités pour suivre ces enfants (enfants qui d’ailleurs, du fait de leur période de scolarisation, ont un INE, sont connus des services de l’EN etc…).

L’article 21, encore une fois, ne fera rien pour ces enfants mais il supprimera une liberté pour tous les autres. Interdire l’instruction en famille aux enfants qui se déclaraient comme tels jusqu’à présent n’empêchera pas cette catégorie d’enfants de poursuivre dans la voie que leurs parents ont choisie.

4. Quatrièmement : Les enfants que monsieur Darmanin se plait à surnommer « les enfants fantômes », dont on fait grand cas mais pour lesquels on ne nous a jamais donné aucun chiffre…

Des enfants qui n’ont jamais été scolarisés ni jamais déclarés comme instruits en famille et qui donc aux yeux de l’éducation nationale, n’ont aucune existence. Cette catégorie sort totalement du cadre de l’instruction en famille, elle ne nous concerne pas.
Avec l’article 21, les enfants fantômes le resteront.

Qui pourrait faire, aujourd’hui, raisonnablement, la démonstration qu’en nous imposant de scolariser nos enfants, jusqu’alors instruits de manière satisfaisante en famille (nos bilans de contrôles annuels en attestant chaque année), ces enfants ne seraient plus fantômes ? L’instruction en famille n’a rien à voir avec ces enfants. Le régime déclaratif ou d’autorisation de l’instruction en famille ne changera rien à la situation de ces enfants-là, il s’agit d’appliquer la loi existante (L131-6). Dans tous ces cas, minoritaires rappelons-le, l’article 21 n’apporte aucune solution.

Lire aussi : Intervention du président de Liberté éducation devant la Commission spéciale

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